Bonjour à tous,
Ce mois-ci je partage avec vous quelques réflexions personnelles, plutôt que de m’arrêter sur une actualité.
🗝 S’échapper
Entendue ce mois-ci cette citation de Mauriac m’a permis de mettre des mots sur un sentiment que je ressentais depuis quelques temps :
“En politique le spectacle est permanent, sauf qu’on ne peut pas sortir de la salle”.
Si seulement cela n’était que la politique. Tout conspire à nous affliger davantage ces temps-ci, quelque soit la direction dans laquelle on regarde, le spectacle est triste, et réserve chaque jour son lot de surprises. Difficile d’y échapper, d’autant plus qu’il captive étrangement.
Évidemment la premiére solution qui s’impose est de prendre du recul : d’abord par l’analyse, ensuite par une consommation savemment dosée du spectacle. J’y reviens longuement dans Comment préparer nos enfants à demain. Le Clemi en France et Common Sense Media aux Etats-Unis font un gros travail. Et le succès de Dérriére nos écrans de fumé permet au grand public de réaliser à quel point, pour le numérique comme pour le reste, c’est le dose qui fait le poison (il y a deux ans, je relayais déjà les initiatives du Center For Humane Technology).
Mais la question la plus importante pour moi en ce moment est ailleurs : comment s’extraire émotionnellement de ce spectacle, et pour le dire franchement comment y échapper, en allant se ressourcer ailleurs, ou autrement ? Deux pistes, inspirées de lectures ou d’écoutes récentes.
“Rêvons un peu. On pourrait imaginer dans nos sociétés occidentales urbaines, comme à Pokoïniki ou à Zavarotnoe, des petits groupes de gens désireux de fuir la marche du siècle.(…) Ils s’inventeraient une nouvelle vie. Ce mouvement s’apparenterait aux expériences hippies mais se nourrirait de motifs différents. Les hippies fuyaient un ordre qui les oppressait. Les néo-forestiers fuiront un désordre qui le démoralise. Les bois, eux, sont prêts à accueillir les hommes; ils ont l’habitude des éternels retours”. Sylvain Tesson, Dans les forêts de Sibérie
Je ne retiens ici pas tant l’élan utopiste (quoique ces utopies prennent de plus en plus la forme de communautés organisées qui sont bien réelles), que la profonde antithèse entre cette société “dont le désordre démoralise” et ce milieu naturel dont l’harmonie enchante.
Deuxième piste. J’ai été presque ému en écoutant cette émission dans laquelle plusieurs personnes reviennent sur leur pratique assidue du Yoga. Je me suis remémoré pourquoi j’étais venu au Yoga, mes premiéres expériences. On retrouve dans cette série d’émissions consacrées au Yoga toutes les raisons qui me le font aimer. Tout à la fois baume au corps et à l’âme, il est une manière de d’évacuer le monde tel qu’on le connaît et de repenser notre relation à nous et à lui.
Plus ce spectacle sera ressenti comme oppressant et minant, plus nous exprimerons le besoin de donner à nos enfants des outils non seulement pour le considérer avec recul, mais aussi et surtout pour nous en abstraire ou mieux le redéfinir.
✉️ Relier
Ce mois-ci, c’était mon anniversaire. Comme je cherche à être un papa exemplaire et que j’ai décidé depuis 1 an de ne plus acheter d’objet pour l’anniversaire de mes enfants (oui je suis dûr ;-), je me suis appliqué la même régle.
Mieux, j’ai poussé le vice jusqu’à me faire offrir le parrainage de deux enfants en Amérique du sud. Dorénavant, j’envisage de faire du don un cadeau systématique. Manière de montrer que donner est une autre manière de s’enrichir. Peut-être est-ce une idée un peu sophistiquée pour les enfants, mais à force ils comprendront peut-être.
Je ne suis pas convaincu que mes garçons, trop jeunes, se lancent dans une correspondance. Les échanges sont par email et en anglais. Je vais y travailler, mais j’avoue préférer le support papier. Je suis un peu vieille école pour les correspondances.
Il me semble, au-delà de cet exemple, que dans ces temps de distanciation, où le spectacle du monde nous bouscule chaque jour, les correspondances paraissent plus que jamais utiles. Elles offrent le peu d’introspection que l’on s’autorise ces temps-ci. Cela vaut pour nous et pour les adolescents. Je pense y revenir même-moi. Quant aux enfants, à partir d’un certain âge, ils peuvent voir dans les correspondances l’occasion de réfléchir et d’écrire. L’écriture elle aussi est une manière de prendre du recul et de s’abstraire du temps, tout en prenant un plaisir simple et immédiat.
Bon dimanche à tous, et bon courage pour ce nouveau confinement, qui je l’espère ne sera pas pour vous l’épreuve que fut le premier.
Matthieu